Pour changer
Aujourd’hui j’ai décidé de vous présenter l’église du publicitaire. Pour être exact, l’église de l’abbé publicitaire. Et pour changer, ce n’est pas pour les photos que j’écris cet article.
Bien sûr, vous verrez l’église dans cet article. Mais je vais surtout vous en parler, car son histoire m’a beaucoup amusé.
Photographiquement elle est très intéressante. Sauf qu’on ne peut pas à proprement y entrer. Et surtout sous une pluie battante, il est difficile d’y faire de superbes clichés. On ne prend pas vraiment le temps de réfléchir ses clichés, on cherche surtout à protéger son matériel photo.
L’origine d’une folie
On repère cette impressionnante carcasse de béton de loin. L’imagination fait alors son oeuvre : qu’est il arrivé à cette église ? Que fait elle ici en rase campagne et surtout dans cet état ?
L’histoire commence en 1927. Cette année là un nouveau curé prend possession de la paroisse et de son église, qui remplit bien son rôle depuis le XVIIème siècle.
Mais le nouveau curé est un homme entreprenant. Il nourrit des rêves de grandeur et ne se satisfait pas de cette modeste paroisse. Egalement doté de talents de communication, il écrit des articles dans une revue diocésaine. Très vite il dénigre son église dans sa revue, la qualifiant par exemple de « demeure trop indigne du Maître de la Terre et des Cieux ». Seulement quelques mois après son arrivée, il demande déjà la construction d’une nouvelle église. Sa hiérarchie ne réagit pas.
L’abbé n’a pas le temps d’attendre. En 1931, à défaut d’avoir un assentiment de l’évêché, il prend les devants : il trace à la charrue le contour de la future basilique et bénit le lieu qu’il a lui même choisi. Accessoirement ce lieu est un terrain privé qui ne lui appartient pas.
L’église du publicitaire
Le projet démarre réellement en 1936. Le terrain n’appartient toujours pas au diocèse – il sera acquis en 1946. Cette année là (1936) l’évêque lance un appel d’offre et sélectionne un projet pour la construction de l’église.
Mais les péripéties ne s’arrêtent pas là. Déjà surdimensionné à la base pour la petite paroisse, on se rend vite compte que le budget nécessaire à l’édification de l’église est en fait trois fois supérieur à ce qui était prévu au départ. Les travaux ne se lancent toujours pas.
Une fois encore, l’abbé n’est pas prêt à baisser les bras. Il met à contribution les paroissiens non seulement pour financer le projet, mais aussi directement pour l’édification. C’est eux qui creusent les fondations et débutent la construction de l’église. Mais l’argent manque toujours.
L’abbé mettra alors à profit ses talents de communicant, innovants pour l’époque : réalisation d’un film de promotion, sollicitation des paroisses de France et de Navarre par courrier postal, et même vente de produits dérivés tels que cartes postales, calendriers, colliers, … En vain.
L’abandon du projet
Faute d’argent, les travaux s’arrêtent en 1938. Le début de la guerre y met un terme définitif. Le curé meurt en 1950 sans avoir vu son grand projet se réaliser.
Cela fait près de 70 ans que cette immense carcasse de béton veille sur la campagne environnante. Personne n’a jamais su quoi en faire. Pendant longtemps des amateurs de messes noires ou de spiritisme s’y sont retrouvés. Puis récemment, les intempéries ont fragilisé l’édifice, le rendant dangereux. Par cette occasion embêtant le diocèse encore une fois car il a fallu le sécuriser – raison pour laquelle nous n’avons pas pu pénétrer à l’intérieur mais juste jeter un oeil à travers les grilles.
La démolition coûterait trop cher pour le diocèse. Donc on laisse l’église du publicitaire se dégrader doucement, en attendant des jours meilleurs. Le lierre recouvre l’édifice. On ne parle plus d’herbes folles mais plutôt d’arbres de plusieurs dizaines de mètres à l’intérieur de l’église. C’est une véritable jungle dans le choeur.
En terme d’urbex
Le grillage qui entoure l’église du publicitaire n’a pas fait long feu depuis son installation. Nous avons vite trouvé un accès. Par contre nous n’avons pas pu pénétrer à l’intérieur de l’église, qui est bien sécurisée. D’un point de vue urbex c’était rapide : nous avons fait un petit tour de l’église sous une forte pluie. Mon appareil photo me remercie de ne pas avoir traîné. On voit d’ailleurs plusieurs traces de gouttes sur mes photos ! Voilà, photographiquement rapide, mais j’aime bien cette histoire que je souhaitais partager avec vous. J’espère qu’elle vous a plu.